Outreau, l'autre vérité
par Karl Zero
Sorti en mars 2013, ce formidable film documentaire de Serge Garde est né à l'origine d'un constat commun: le "retournement de situation" opéré dans l'affaire d'Outreau, qui transforma tous les ex-coupables en acquittés, et les ex-victimes (les enfants) en affabulateurs nous paraissait curieux. J'ai donc lancé la production, à l'origine pour une chaîne de télévision, qui s'est - sans surprise - très vite retirée du projet... Naquit alors l'idée, puisque ce film était indiffusable en télé, d'en faire un film de cinéma. L'association "Innocence en Danger" et "Ligne de Front", la boîte de prod de Bernard de la Villardière, prirent le relais, et le film put exister. Merci à eux. Voici ce qu'en a dit "Le Monde" à sa sortie: "Disons-le d'emblée, voici un film qui met mal à l'aise. Serge Garde, son auteur, entend nous prouver que le verdict d'acquittement qui a exonéré les accusés des charges de pédophilie pesant contre eux dans l'affaire d'Outreau, est loin de correspondre à la vérité des faits, pis, que le procès en appel qui s'est déroulé à Paris en 2011 fut une caricature de procès, où des hordes d'avocats prestigieux en cheville avec la presse auront eu raison contre un juge intègre et la vérité des faits. Ce n'est pas rien, s'agissant d'une affaire qui a à ce point défrayé la chronique, remontant jusqu'au plus haut niveau de l'Etat pour se conclure par le constat d'une tragique erreur judiciaire. Qui ne se souvient des excuses publiques du ministre de la justice d'alors, de la prise de parole du président Jacques Chirac en personne pour s'adresser aux acquittés, puis de la commission d'enquête parlementaire qui étrilla le zèle du juge d'instruction Fabrice Burgaud. Serge Garde entend remettre tout cela à plat et nous persuader de l'inconséquence de la conclusion officielle de ce retentissant procès de pédophilie. Ex-journaliste d'investigation à L'Humanité, réalisateur de reportages pour la télévision et de plusieurs livres consacrés à des domaines sensibles (l'industrie du sexe, la mafia, les réseaux pédophiles...), Serge Garde procède pour ce faire par accumulation de témoignages concordants. Plus d'une vingtaine de personnes expertes en leur domaine – avocats, magistrats, journalistes, psychologues... – sont interrogées dans son film et témoignent à charge, pour autant que le montage respecte l'équilibre de leur parole, contre la manière dont s'est conclue cette affaire, qui voit d'un côté douze enfants reconnus victimes de viol et de l'autre la majorité des accusés ressortir libre du tribunal." Je reproduis ici "Le Monde" car il fut le plus nuancé dans sa critique du film. Les autres médias, unanimes, vouèrent Serge Garde aux gémonies !
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