Notre enfant refuse de manger de tout
par CmavieTV
Agnès Laucher - Nous voulons que nos enfants mangent de tout. Mais notre dernière refuse de manger certains plats. Changer la règle serait-il perdre l'autorité ? - Il n'est pas seulement bon mais aussi nécessaire d'avoir des règles. Les règles marquent les limites et posent le cadre de l'autorité afin que chacun puisse se responsabiliser et user de sa liberté. Alors la question qui se pose est de comprendre comment les règles participent à une meilleure responsabilité ou au contraire comment deviennent-elles sources de pouvoir, de manipulation et de non respect de l'autre? Dans ces forces d'influences qu'ont les parents, quelles différences y a-t-il entre autorité et pouvoir? Quand des règles touchent les goûts personnels, le fonctionnement particulier d'un enfant, sa façon de penser, de manger, de s'habiller, de dormir, ses goûts pour les loisirs, ses goûts alimentaires ou sportifs, ses choix de camarades, nous pouvons dire que ce sont des règles ou des principes qui touchent sa vie privée et donc des règles qui touchent son autonomie et sa liberté. Ce sont des règles intrusives, sans respect pour la personnalité de son enfant. Elles ont pour fonction de tranquilliser les parents afin de formater leur enfant, comme ils le désirent, mais non de le responsabiliser. L'enfant doit plaire à ses parents. Il doit se conformer à leur désir, à leur manière de voir. L'expression libre est censurée si celle-ci est contraire aux habitudes familiales. Les parents élèvent alors leur enfant en imposant leur manière de voir. Si l'enfant n'obtempère pas, des sanctions répressives sont prévues. Sa marge de liberté est faible. Les forces d'influences sur lui sont externes et parentales. Nous pouvons considérer cette manière de faire comme une sorte d'abus de pouvoir des parents sur leurs enfants. Le pouvoir et l'autorité sont deux concepts bien différents. Votre pouvoir va forcer votre enfant à faire comme vous le voulez alors que votre autorité va lui présenter les conséquences de ses choix: "Si tu ne veux pas manger de tout, ce n'est pas grave: chacun ses goûts; mais si tu as encore faim, tu ne pourras pas manger autre chose à la place et tu n'auras pas ton goûter plus tôt". Ce genre de frustration l'aide à sortir de sa toute-puissance infantile. Par contre, ne le privez pas du dessert prévu et ne vous inquiétez pas sur la quantité de nourriture qu'il mange: il ne va pas se laisser mourir de faim. Vous l'avez compris, votre enfant qui ne veut pas manger de tout, manifeste une sorte d'opposition à votre pouvoir et non à votre autorité. Vous ne perdrez donc pas votre autorité en changeant la règle mais vous décidez au contraire de ne plus entrer dans des relations de pouvoir vis-à-vis de vos enfants. Et c'est un bon choix. L'enfant choisit donc de manger ou de ne pas manger en connaissant les conséquences de son choix par avance. Cette manière d'agir l'aide à se responsabiliser et à concevoir l'idée que les choix impliquent des conséquences à assumer. Cette liberté de choisir, de décider avec les conséquences connues a priori, est bonne pour lui, pour la construction de sa personnalité. Le pouvoir, au contraire, oppose et engendre des relations difficiles, compliquées où des jeux d'opposition parents-enfant vont rapidement se mettre en place. Le refus de manger certains plats en est un exemple. Alors que préférez-vous? Changez la règle en prenant l'autorité et en lâchant le pouvoir sur vos enfants ? Si vous optez de changer la règle, prévenez vos enfants que vous avez quelque chose d'important à leur dire. C'est à vous, père, d'exprimer la nouvelle règle. Vous représentez l'autorité devant vos enfants. Dîtes-le officiellement à table devant tous les enfants avant le début d'un repas. C'est ainsi que vous montrez votre autorité, votre autorité dans le changement d'une règle: "A partir d'aujourd'hui, nous décidons de retirer la règle de devoir manger de tout; chacun ses goûts et son appétit. Nous décidons de respecter vos goûts et de ne plus vous imposer notre façon d'envisager la relation avec la nourriture. Si vous ne voulez pas manger d'un plat, vous ne le mangerez pas; vous pouvez quand même manger le dessert prévu mais vous n'aurez rien de plus de ce qui est prévu; le goûter ne sera pas plus tôt, même si vous avez faim: vous attendrez l'heure prévue pour le goûter; est-ce que vous avez des questions? ". Vous le voyez: entrevoir l'éducation sous le focus de la liberté et de la responsabilité de son enfant envisage une autre approche parentale. L'enfant est respecté dans ses goûts mais n'est pas roi. Il doit assumer pleinement les conséquences de ses choix. Des limites lui sont toujours données afin qu'il se sente en sécurité. Au lieu d'un pouvoir malsain, l'enfant a alors la possibilité de reconnaître l'autorité protectrice de ses parents et d'y adhérer ou non avec toutes les conséquences de son choix. L'objectif n'est plus d'imposer ses idées mais de favoriser des relations respectueuses et valorisantes entre les différents membres de la famille pour respecter les besoins de chacun.
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