Le nouveau chef de service me prend en grippe

Guy-Daniel Koechlin - Le nouveau chef de service me prend en grippe alors que j'ai toujours donné satisfaction. Reproches, humiliations, menaces, comment m'en sortir ? Ah ! Voilà une bonne question car elle touche malheureusement un nombre croissant de salariés. Dans un sens, il est normal que l'arrivée d'un nouveau manager modifie au moins partiellement la donne : une des caractéristiques d'un être humain est d'être unique. Donc pour un même travail, et malgré des process stricts, nous avons tous une manière différente d'aborder une même activité. Quel que soit le groupe, familial, professionnel, associatif ou autre, l'arrivée d'un nouveau membre va donc toujours perturber peu ou prou. Première chose à faire : accepter la remise en question, plutôt que se braquer tout de suite. Certes ce n'est pas quelque chose de facile ni de naturel. Néanmoins, il y a beaucoup de noblesse et de grandeur à accepter de se remettre en question. Sans culpabiliser, elle doit se faire honnêtement, face à soi-même. Je vous encourage, par exemple, à parler avec un collègue de travail proche : demandez-lui  est-ce que vraiment, par rapport à ce qui m'est demandé, je suis  à côté de la plaque ?  J'ai connu un cas de souffrance au travail dans lequel le manager réclamait l'atteinte d'objectifs importants sous prétexte qu'untel ou unetelle les dépassait. Renseignements pris, c'était faux. Heureusement que cette dame avait eu le courage de demander ce qu'il en était réellement à la collègue citée. Ceci dit : Lorsque des suppressions de postes sont évoquées dans une entreprise où de nouveaux chefs de service sont mis en place, cela évoque instantanément pour moi un risque de harcèlement de gestion. C'est un mode de management qui permet à une entreprise de ne pas licencier, ce qui lui reviendrait très cher en indemnités. Elle va donc essayer de pousser progressivement ses salariés à la démission en les décourageant. Paradoxalement, le harcèlement de gestion touche souvent ceux qui ont toujours donné satisfaction. C'est à ceux-là que l'on va soudain demander de faire une formation qualifiante pour pouvoir simplement continuer à occuper le même poste. Parallèlement, on va leur reprocher tout un tas de petits détails de leur travail. Il est très important de connaître cet aspect des choses pour ne pas être détruit intérieurement. En effet, les reproches qu'on peut nous faire, même s'ils sont injustifiés, ont souvent une influence négative en insinuant le doute en nous : suis-je réellement aussi mauvais qu'on me le dit ? N'y aurait-il pas une part de réalité dans les reproches que l'on me fait ? Vous connaissez l'adage :  critiquez, critiquez, il en restera toujours quelque chose !  C'est très insidieux et malheureusement redoutablement efficace. Mais si vous avez conscience de ce mécanisme, c'est déjà un premier pas car il vous permettra de voir les choses sous un autre angle. L'idéal serait d'obtenir des témoignages écrits de collègues ou d'anciens collègues. Mais il se peut que la crainte les empêche de prendre parti. C'est très souvent le cas et les harceleurs utilisent régulièrement la peur comme une arme. Je vous conseille d'écrire le plus possible tout ce qui vous est demandé ou reproché et parallèlement tout ce que vous faites en réalité. Si vous pouvez sauvegarder des mails à ce sujet, c'est encore mieux, mais ce n'est pas simple car la plupart des harceleurs se débrouillent pour ne pas laisser de trace écrite. Si vous arrivez à rassembler des documents objectifs, cela aura deux conséquences : La première est de vous aider à vous prouver à vous-même la réalité de la valeur de votre travail et démontrer l'injustice que représentent les reproches. La deuxième est que cela vous permettra de constituer un dossier solide au cas où vous deviez porter l'affaire devant les prud'hommes. Mais je vous conseille également d'en parler à votre médecin du travail qui pourra avoir une approche objective de la situation et pourra dans certains cas faire prendre conscience au harceleur des risques judiciaires qu'il prend en agissant de la sorte car la justice punit sévèrement ce genre de situation (jusqu'à 15 000 euros d'amende et un an de prison en France par exemple). En somme, vous n'êtes pas si seul que cela, mais ça va vous demander du courage et de la détermination. De toute façon, qu'avez-vous à perdre ?