Je refuse d'être lié pour préserver ma liberté

Béatrice Beauverd - J'ai peur de toute forme d'engagement, et je refuse d'être lié à quoique ce soit. Ca me permet de préserver ma liberté, n'êtes-vous pas d'accord ? Eh bien si vous le permettez, je dirai que vous donnez vous-même la réponse à votre question ! La réponse se trouve déjà dans votre question. J'ai peur de toute forme d'engagement, et je refuse d'être lié à quoi que ce soit . Vous revendiquez à juste titre le droit à la liberté, mais en fait est-ce que vous n'essayez pas plutôt d'exorciser une certaine forme de peur ? Et vous savez que la peur est un peu comme une emprise et qu'elle trahit un manque de liberté. Aujourd'hui même, un homme, encore jeune, est venu me partager son meilleur souvenir d'enfance... C'était un jour de lessive, il était seul dehors, à côté du linge suspendu lorsque le vent s'est levé et que l'orage a commencé à gronder... Les première gouttes d'eau se sont mises à tomber... et le linge claquait dans le vent et lui, il se sentait vivre, VIVRE avec le vent qui lui fouettait le visage et l'obligeait à s'incliner pour se tenir debout... Il était heureux, pour la 1ère fois. Violé par un père alcoolique depuis sa plus tendre enfance jusque dans son adolescence, il avait comme cauchemar l'image d'un cercueil dans lequel il était enfermé, coupé en morceaux... Ses mains avaient été enlevées... mais elles étaient restées en dehors du cercueil. Depuis tout enfant, la honte l'habite toujours, il ne fait confiance à personne, plus personne. Il est intelligent, il a fait des études supérieures dans les meilleures écoles, c'était la seule chose pour laquelle ses parents étaient d'accord. Depuis la fin de ses études, il lui est impossible de se fixer quelque part, et notamment dans un travail régulier. Il voyage, il a fait le tour du monde, il ne tient pas en place... A voir ainsi, nous dirions que c'est un être libre, souriant continuellement, pourtant il n'arrive pas à subvenir à ses propres besoins, il reçoit l'aide sociale. Peut-on dire qu'il est réellement libre, vraiment ? Dans son cas, on comprend bien que derrière les apparences de liberté, de faire ce qu'il veut, aller où il veut, il fuit quelque chose qui le fait souffrir à l'intérieur. Il fuit le danger d'une relation affective... qui pourrait devenir abusive... La peur de faire confiance et de se faire abuser à nouveau... peut-être pas physiquement, mais autrement, moralement, financièrement,... Fuir... c'est d'abord SE fuir, fuir cette douleur, au niveau de l'estomac, cette boule au ventre, cette angoisse chaque fois que quelqu'un vous plaît. Vous vous rendez compte que vous pourriez vous laisser aller à l'aimer, donc vous faites vos valises ! Même si vous fuyez au bout de la terre... vous y trouverez vos douleurs, votre peur... Allez sur les plus hautes montagnes, elles y seront aussi. Descendez dans les grottes, les gouffres les plus profonds et elle vous y précédera. La peur n'est pas un élément extérieur à soi, elle est intérieure, elle est le résultat d'une expérience initiale, d'un choc affectif qui vous a brisé le coeur, votre tête veut sortir de là... et vous agissez comme un homme qui voyant qu'il se noie, se tire par les cheveux pour sortir de l'eau. Donc je suis condamné à vivre avec ? , me direz-vous. Non, il est possible d'en sortir . Je ne serai jamais libre ? Si, vous pouvez le devenir ! Ce ne sera pas sans douleurs, c'est vrai, mais c'est possible de vivre libre. La liberté ? Elle n'a rien à voir avec des murs extérieurs. Souvenez-vous de Nelson Mandela. Il a passé plus de trente ans dans une prison minuscule... mais son esprit était libre. Alors qu'en pleine liberté, on peut se sentir enchaîné. Le chemin vers la liberté passe obligatoirement par la vérité. La vérité qui libère. Êtes-vous celui que vous croyez être, ou ce qu'on dit que vous êtes ? Un pauvre gars, un nul, un paumé, celui que personne n'aimera jamais... celui qui est juste un objet que l'on jette après usage, une balayure ? Peut-être l'avez-vous entendu dire toute votre enfance... mais est-ce vraiment la vérité ? La vérité, c'est découvrir que le mensonge a été la prison qui enferme, le refuge où nous nous sommes engouffrés pour échapper au pire... Non non, tout va bien ! Ces mots faciles, qui sont faits pour stopper toute tentative d'ingérence par autrui... alors que tout va mal ! C'est lorsque l'on se saisit d'une parole de vérité qu'il devient possible de se remettre debout. La parole que l'on entend, et que l'on dit, est en fait à la base de toute relation. Plus la parole sera vérité et plus elle sera guérissante. Elle va vous redonner une dignité. La parole est porteuse de vie, de sécurité, de créativité et elle seule va vous libérer progressivement de la peur. Vous voulez vérifier ? Prenez la parole ! Dites ce que vous pensez, ressentez... et vérifiez si ce que vous dites est conforme à la vérité ! Intéressant, non ?