Enfant hospitalisé, trajet, conflit avec mon mari

par CmavieTV

Agnès Sanders - Notre enfant est hospitalisé et nous avons un long trajet pour aller le voir, mon mari ne comprend pas que je veuille y aller tous les jours et j'ai peur que cela crée un conflit entre nous, que faire ? Pour la plupart des mamans, l'hospitalisation d'un enfant, surtout si elle est vécue dans l'urgence, constitue une souffrance aiguë qui mêle sentiments de peur, perte de contrôle, parfois même culpabilité ou du moins une remise en question de sa capacité à prendre soin de son petit. Lorsque l'enfant est malade à la maison, on ressent la peur de l'aggravation, la peur de ne pas savoir que faire, la peur d'être seule à prendre des décisions. Lorsque l'enfant est hospitalisé, on ressent d'abord un soulagement : L'enfant est entre de bonnes mains, il va être tiré d'affaire. Plus ou moins rapidement pourtant, s'installe une crainte de l'avenir, et l'impression qu'une partie de nous-mêmes nous a été arrachée. Je me souviendrai toujours avoir allaité mon bébé jusqu'au dernier moment, lorsque j'ai du la remettre entre les mains du médecin du Samu alors qu'elle avait trois mois. Elle respirait si mal qu'elle n'avait presque plus la force de se nourrir, et pourtant je gardais aussi longtemps que possible ce lien de la chair. C'est un instinct maternel normal de vouloir être près de notre enfant malade. C'est aussi un besoin primordial de l'enfant malade d'avoir sa mère auprès de lui. C'est pourquoi, depuis les années 70, on a créé des possibilités d'hospitalisation mère/enfant dans de nombreux services hospitaliers. Parfois, il n'est pourtant pas possible pour une mère de rester avec son enfant. Parfois, c'est le service hospitalier qui n'est pas conçu pour ça, parfois la maman a d'autres obligations, familiales ou professionnelles. Dans les services de réanimation infantile comme celui où ma fille est restée 9 mois, les conditions techniques et l'état critique des patients ne permettaient pas le séjour des mamans. C'est alors souvent une souffrance aiguë, qui ne peut être allégée que par des visites quotidiennes. Nos proches, que ce soit nos parents, ou parfois même nos maris même s'ils sont très naturellement attachés à l'enfant, ne ressentent pas comme nous ce déchirement. Souvent, il leur suffit d'avoir des nouvelles quotidiennes, bonnes si possibles, pour continuer à vivre une vie à peu près normale. Il s'ensuit un risque de fossé entre les époux. La maman focalise la presque totalité de son attention vers l'enfant malade. Quand elle n'est pas dans sa chambre, elle attend le moment où elle y sera. Elle n'est plus disponible pour autre chose. Son mari, lui, a bien une partie de son attention dirigée vers son enfant malade, mais il a d'autres préoccupations, professionnelles en particulier. Il désire de tout coeur une amélioration, il aime aller voir son enfant, mais il doit gagner sa vie, côtoyer ses collègues, et lorsqu'il rentre à la maison, il a encore toute sa journée dans la tête. Il est alors confronté à la dure réalité d'une épouse tout à fait indisponible à tout ce qui n'a pas un rapport direct avec la maladie de leur enfant. Si la communication dans le couple n'est pas exceptionnelle, il y a un réel risque d'incompréhension et même de rupture. Si l'hôpital est loin du domicile, la maman doit passer plusieurs heures dans les transports publics ou en voiture. Les autres enfants ne sont plus accueillis à leur sortie de l'école. Le papa se demande si ce n'est pas suffisant d'aller à l'hôpital un jour sur deux, surtout si la situation se prolonge. Si l'enfant est dans un état critique, ou tout petit, il n'est peut-être même pas conscient de la présence de sa mère. Alors, à quoi bon ? Chaque famille est différente et devra trouver sa solution. L'essentiel est d'arriver à continuer à communiquer, à échanger sur le ressenti de chacun. Il est essentiel de se rendre compte que chacun vit la situation différemment, et surtout de ne pas avoir une attitude de jugement. Si la situation se prolonge au-delà d'un mois, certains modes de fonctionnement familiaux devront être complètement revus. A situation grave, adoptez des moyens d'exception. Quoi par exemple ? Eh bien ça peut entrainer un déménagement de la famille, un changement de travail, ou une séparation temporaire et librement consentie des époux. Certaines associations organisent l'accueil de parents d'enfants hospitalisés à proximité de l'hôpital. Ce n'est jamais facile, mais si c'est bien organisé et que la communication reste ouverte, c'est possible. Certains couples ne résistent pas à une telle épreuve, d'autres en sortent renforcés. L'épreuve en elle-même ne casse pas un couple, mais elle le rend vulnérable. Bien entendu, l'aide de la famille plus large, d'amis, d'associations, d'église est un facteur favorable. Mais l'essentiel reste et demeurera pourtant une bonne communication dans le couple, bien au-delà du ressenti de chacun.

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