Comment évaluer la douleur

par CmavieTV

Anne-Claire Chapuis - Mon père semble souffrir et il ne peut plus parler. Comment peut­on évaluer et traiter sa douleur ? -La douleur n'est parfois pas suffisamment prise en compte par les médecins lorsqu'une personne ne peut plus s'exprimer verbalement. En effet, quelqu'un qui va réclamer un remède à corps et à cri va forcément se faire entendre plus que quelqu'un qui ne dit jamais rien. C'est donc à l'entourage et aux soignants, en institution, d'être vigilants par rapport à cette question sensible. Mais d'abord, y a-t-il des échelles de mesure de la douleur ? En général, quand une personne peut parler, elle décrit sa douleur, son intensité et sa localisation. Le médecin prescrit ensuite le médicament qu'il juge le plus approprié. Mais comment savoir si celui qui ne peut plus se plaindre a mal ou pas ? Bernard Wary, médecin travaillant au Centre Hospitalier de Metz et Thionville, spécialiste en soins palliatifs, a mis au point une échelle de mesure de la douleur pour les personnes ne pouvant plus s'exprimer verbalement. Cet outil s'appelle DOLOPLUS. Il est composé de dix ndicateurs permettant de déterminer si la personne souffre ou non. Par exemple, l'observateur va regarder les mimiques de la personne, écouter ses gémissements, et remarquer si son comportement est inhabituel. Ensuite, ces indicateurs ont un score selon leur fréquence. Par exemple, si la personne se plaint occasionnellement, seulement quand on la touche ou de façon continue, cela signifie que la douleur n'est pas de la même intensité. Les 10 indicateurs, composés chacun de 4 items sont notés de 0 à 3, ce qui fait qu'on peut obtenir un score maximal de 30. A partir de 4 il y a de la douleur. Un traitement va donc être mis en place contre la douleur. Puis, c'est en regardant l'évolution du score qu'on peut déterminer si les antalgiques sont efficaces ou non. Si le score baisse, les antidouleurs sont pertinents. Par contre, si le score reste stable, voire s'il augmente, alors il faut songer à un traitement plus fort. Que pouvez-vous faire, vous, en tant qu'enfant pour votre père qui ne peut plus se plaindre ? Voici trois conseils pour améliorer la prise en charge de sa douleur : 1. Demandez à voir le médecin et demandez-lui de vous expliquer à quoi servent les médicaments que prend votre père. S'il a déjà des antalgiques, parlez-en au médecin et rendez-le sensible aux observations de manifestations de la douleur que vous avez perçues chez votre père. 2. Faites attention aux interprétations hâtives que vous pouvez faire de vos observations. En effet, vous avez déjà entendu parler de soignants euthanasiant un patient parce qu'ils pensaient qu'il souffrait et que rien ne pouvait le soulager. Ne négligez pas l'accompagnement moral et spirituel, qui peut apporter davantage de bien-être à la personne qu'un médicament. C'est pourquoi le DOLOPLUS est généralement rempli par une équipe pluridisciplinaire afin de partager les points de vue et éviter ainsi un jugement arbitraire. En effet, la personne peut gémir pour avoir quelqu'un à ses côtés et non dans le but d'obtenir un médicament. Peu d'entre nous sommes empressés de soulager la douleur morale, qui est parfois plus forte que la douleur physique. 3. Sachez que le score obtenu au DOLOPLUS n'est pas toujours significatif ! En effet, un score élevé ne veut pas forcément dire que la personne souffre beaucoup, ni un faible score que la personne souffre peu. Le DOLOPLUS mesure la douleur manifestée. Or, toute personne ne manifeste pas sa douleur de la même façon. Certains ne diront rien, même s'ils ont très mal, car ils ont appris, dans leur éducation, à supporter la douleur. D'autres, plus douillets, exagéreront leur douleur. Ils manifesteront une douleur plus forte que celle qu'ils endurent en réalité. C'est pourquoi, seule l'évolution du score peut être un réel indicateur de l'efficacité du traitement antalgique. En conclusion, retenez qu'avec tous les moyens qui existent aujourd'hui, il n'est plus permis de laisser souffrir quelqu'un. Votre rôle en tant que famille est primordial car vous êtes le mieux à même de connaître votre père et de dire s'il souffre ou non. Par le passé, vous savez s'il l'exprimait facilement ou pas. Observez-le et n'hésitez pas à en parler aux soignants et à son médecin traitant, vous lui rendrez peut-être un grand service. N'oubliez pas que la souffrance morale est tout aussi importante que la douleur physique et que votre présence auprès de votre père est parfois le meilleur médicament !

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