Combien de temps dure un deuil ?

par CmavieTV

Isabelle d'Aspremont - Combien de temps dure un deuil ? Répondre à votre question précisément n'est pas possible. Je n'aime pas trop généraliser le temps d'un deuil. Pourquoi ? Eh bien, parce que ça dépend du type de relation entretenue avec la personne dont vous avez à faire le deuil. Mais je vais vous donner une moyenne : le processus de deuil dure environ 2 années. Le temps du deuil dépend aussi de la capacité de la personne à faire ses deuils. Est-ce qu'elle a appris dès son plus jeune âge à les faire ? Comment cela se passait-il dans sa famille ? Est-ce qu'on était attentif à ses émotions ? etc. La durée du deuil dépendra aussi du type d'attachement que vous entretenez avec la personne décédée. Pour bien comprendre le processus de deuil, il est nécessaire de se rappeler que l'être humain est un être d'attachement. Sans attachement, pas de possibilité de vie. C'est pourquoi nous formons avec les personnes des liens à intensité variable selon le type d'investissement affectif que l'on se permet vis-à-vis d'une personne. Rappelez-vous ce que dit le Petit Prince à la rose : C'est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante . Il est sûr qu'un lien de type fusionnel ou symbiotique prend plus d'importance et de temps qu'un lien d'amitié, même si celui-ci peut être plus profond. Lorsque la perte survient, il se produit une blessure au système d'attachement. Plus l'investissement est important, plus la blessure est grande et plus on aura besoin de temps pour vivre son deuil. Mais l'organisme sait comment protéger son intégrité et faire ses deuils, il se met immédiatement au travail pour réparer la blessure subie. La durée du deuil va aussi dépendre de cette question fondamentale que l'on se pose : Qu'est-ce que cette personne représentait pour moi ? . Au-delà du deuil primaire, il y a un deuil secondaire, presque plus important que le premier. Vous allez comprendre par l'exemple suivant : Je me souviens d'un homme qui avait perdu son fils. Lors d'une conférence, il nous racontait à Jean Monbourquette et à moi, que tant qu'on n'avait pas perdu un enfant, on ne pouvait pas comprendre ce déchirement intérieur. On lui demanda alors : Qu'est-ce que votre fils représentait pour vous ? Il nous répondit :  Mon fils venait de terminer ses études de médecine, il était ma fierté. Jeune, j'avais moi aussi entrepris des études de médecine. J'ai dû malheureusement les interrompre car mes parents n'arrivaient plus à les financer. Alors, lorsque mon fils m'a appris qu'à son tour il voulait devenir médecin, j'ai travaillé des heures et des heures pour financer ses études. Je ne voulais pas qu'il ait à subir le même sort que moi. Imaginez ce que je perds en le perdant aujourd'hui ! . Le père perd son fils, c'est le deuil primaire. Mais il perd aussi pour la deuxième fois son rêve de devenir médecin. Le deuil secondaire est aussi essentiel à traiter que le deuil primaire. De plus, il y a des résistances propres à chaque étape de deuil. Elles sont des protections nécessaires à la personne, un bon thérapeute de deuil ne va pas à l'encontre de celles-ci. Il respectera le rythme de la personne. Je me rappelle d'une dame, âgée de 75 ans, qui avait perdu son conjoint. Elle continuait à donner la main à son mari, même après la mort de ce dernier. C'était trop douloureux pour elle de réaliser son départ. Elle aura besoin de plus de temps pour faire son deuil, leur relation étant très fusionnelle. Bon nombre de personnes ne font pas leur deuil à la mort d'un être cher. Elles participent au rituel entourant le décès, et leur deuil s'arrête la. Elles estiment avoir fait leur deuil. Quelques années plus tard, elles éprouvent des moments de dépression ou sont toutes étonnées de ressentir tant de chagrin à la mort d'une connaissance, elles n'ont pas fait le deuil précédent. Il n'est jamais trop tard pour faire son deuil. En effet, votre corps garde en mémoire toutes les émotions passées. Je me souviens d'un ami qui avait fait le deuil de son père 22 ans après sa mort, il pleurait toutes les larmes de son corps comme si c'était hier ! D'autres personnes vont garder de la colère vis-à-vis de la personne décédée, une sorte de rancoeur. Je vais vous dire, tant qu'elles seront dans cet état émotionnel, elles n'avanceront pas dans leur deuil. C'est une manière de garder la personne décédée présente ! D'autres encore vont choisir une personne de substitution pour remplacer la personne morte. On choisira une fille, généralement, l'aînée, pour remplacer la mère disparue. Lors d'un divorce, nous pouvons observer le même processus. Bien des hommes, par exemple, font du remplacement. Ils n'entrent pas dans la profondeur de leur deuil mais choisissent une nouvelle femme après parfois seulement quelques mois de séparation, si ce n'est pas quelques semaines ! D'autres aussi vont vouloir s'occuper des autres à la place de faire leur propre deuil. C'est une manière de se soigner soi-même, ou en tout cas qui donne l'illusion de se soigner en soignant les autres ! L'ennui, c'est que c'est lourd pour les personnes qui reçoivent cette aide-là car on veut les aider de la même manière que l'on voudrait être aidée. Bien des facteurs peuvent diminuer encore la résolution d'un deuil. Mais vous savez, l'important est de le vivre... pour pouvoir aimer encore !

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