Venezuela : pourquoi Chavez est mort deux fois
par lejdd
LE GRAND ANGLE DIPLO - François Clemenceau, rédacteur en chef au JDD, revient, à l'occasion de son Grand angle diplo de la semaine sur les futures élections législatives au Venezuela. Si tout se passe normalement, les élections législatives qui se déroulent dimanche prochain 6 décembre au Venezuela devraient consacrer la défaite du chavisme, après 16 ans de pouvoir ininterrompu marqués par de plus en plus de brutalité à l’égard de l’opposition démocratique et de moins en moins de résultats sur le plan économique et social. Lorsque Hugo Chavez est mort beaucoup avaient prédit que plus rien ne serait comme avant, mais que Nicolas Maduro, son successeur, avait les moyens d’assumer son héritage pour faire vivre l’esprit de la révolution bolivarienne. Aujourd’hui, l’opposition est donnée favorite dans les sondages pour remporter les élections parlementaires. Car le bilan de Maduro est jugé très sévèrement même s’il n’a pas été vraiment aidé par la conjoncture : la chute des cours du pétrole dans un pays qui n’avait pas de stratégie alternative a fortement limité les possibilités du pouvoir d’acheter la paix sociale. Mais la dégringolade de la valeur de la monnaie a entrainé une inflation qui frise les 200%, résultat, le petit peuple qui vivait d’une économie de subventions se retourne contre ses anciens héros. D’autant plus facilement que le pouvoir de Nicolas Maduro n’a pas cherché à dialoguer avec une opposition lorsqu’elle était encore minoritaire. Aujourd’hui, le chef de l’Etat s’en est remis à un découpage électoral grossier pour espérer sauver sa majorité au Parlement tout en déclinant toute responsabilité dans les violences dont sont victimes ses adversaires. Comme dans toute bonne dictature, un cap a été franchi avec l’assassinat mercredi en plein meeting d’un leader de l’opposition. La plupart des grandes démocraties voisines ont condamné ce meurtre, tout comme les organisations de droits de l’homme. Mais le gouvernement cette semaine a osé parler d’un règlement de compte entre bandes rivales. Il continue d’assumer en revanche la condamnation à 13 ans de prison de Leopoldo Lopez, l’un des chefs de l’opposition pour avoir encouragé la population à manifester en février dernier contre le pouvoir. Les violences à l’époque avaient fait une dizaine de morts. Panique sur le front intérieur, mais également sur le plan extérieur. Par pur nationalisme destiné à offrir un bouc-émissaire aux foules, Maduro a fait expulser par milliers les Colombiens qui vivent sur la frontière, puis il a fait fermer cette frontière sous prétexte d’un complot manigancé par cet allié des Etats-Unis contre le Venezuela. Il n’est franchement pas certain que les élections du 6 décembre se dérouleront normalement. Elles peuvent être annulées, truquées ou contestées du fait des violences qui risquent de survenir avant, pendant ou après. Chavez n’est plus là. Maduro en appelle au peuple. Mais il semble bien que ce soit trop tard.
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