Redoine Faïd : les trois mois d'enquête qui ont mis fin à son incroyable cavale.
par Kangai News
Redoine Faïd : les trois mois d'enquête qui ont mis fin à son incroyable cavale. Un chasseur intrigué, des lingettes de toilette, des produits anti-moustiques, une disqueuse, des armes, de fausses plaques d'immatriculation... Autant d'éléments qui ont permis aux policiers de mettre la main sur l'homme le plus recherché de France. Ce mercredi avant l'aube, à Creil (Oise), ils ont interpellé le braqueur Redoine Faïd, en cavale depuis sa spectaculaire évasion de la prison de Réau (Seine-et-Marne). Au terme de 90 jours d'une enquête serrée. Récit. Trois mois de cavale. Trois mois de traque. Jusqu'à ce matin du mercredi 3 octobre, Redoine Faïd était l'homme le plus recherché de France. Depuis sa spectaculaire évasion en hélicoptère de la prison de Réau, en Seine-et-Marne, le 1er juillet dernier, le malfaiteur de 46 ans - fan du film « Heat » et de Robert De Niro, pro du braquage de fourgons, surnommé « l'Écrivain » par les policiers - était parvenu à échapper aux enquêteurs. Parfois de justesse, comme ce 24 juillet où il s'en est fallu de quelques secondes que les gendarmes coincent Redoine Faïd en compagnie de son frère. Voici le récit de son évasion, de sa fuite, et de l'enquête qui a permis de le retrouver. Une invraisemblable évasion Le 1er juillet au matin, un hélicoptère avec à son bord un commando armé se pose dans la cour d'honneur du centre pénitentiaire de Réau (Seine-et-Marne), alors que Redoine Faïd, 46 ans, est au parloir avec son frère Brahim, 58 ans. Pourquoi la cour d'honneur ? Tout simplement parce qu'elle est dénuée de filets anti-hélicoptère, au contraire de la cour principale. Habillés en noir, cagoulés, deux hommes équipés de fusil d'assaut de type Kalachnikov en surgissent et récupèrent le célèbre malfaiteur qui purge une peine de 25 ans de prison, après sa condamnation en avril en appel pour un braquage raté dans le Val-de-Marne qui avait coûté la vie en 2010 à la policière municipale Aurélie Fouquet. L'opération spectaculaire ne dure que quelques minutes. Les débuts de la traque L'hélicoptère est un peu plus tard retrouvé à Gonesse (Val-d'Oise). Molesté par les malfaiteurs, le pilote de l'appareil pris en otage est découvert en état de choc. Le même jour, la police retrouve une Renault Megane noire incendiée sur le parking du centre commercial O'Parinor, à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) à bord de laquelle Faïd et ses complices ont pris la fuite. Des caméras de vidéosurveillance montrent ensuite le fugitif à bord d'un véhicule utilitaire Kangoo quittant le parking. Le lendemain, la voiture est retrouvée carbonisée à Le Fay-Saint-Quentin dans l'Oise, un département où a grandi Redoine Faïd, originaire de Creil. Placé en garde à vue le jour de l'évasion, dans les locaux de la police judiciaire de Versailles, son frère Brahim est remis en liberté dans la soirée du 2 juillet. Selon un haut responsable de la police judiciaire, une centaine de policiers spécialisés sont désormais aux trousses de celui surnommé « le roi de l'évasion » et qui est présenté comme « un individu dangereux ». Un chasseur intrigué Le 8 juillet, dans la forêt domaniale de Verneuil-en-Halatte (Oise), non loin de Creil, d'où est originaire Redoine Faïd, un chasseur intrigué aperçoit plusieurs hommes en train d'enterrer un sac. Il prévient la police : à l'intérieur du sac, il y a deux armes longues recouvertes de papier aluminium, une disqueuse, des gilets pare-balles, des vêtements et des cagoules. Après enquête, ces indices se révèlent cruciaux. Car une partie de ce matériel a bien été utilisée lors de la libération spectaculaire du braqueur - notamment la disqueuse. Ce n'est pas le cas des armes, en revanche ; pour les enquêteurs, pas de doute : elles étaient destinées à être utilisées lors d'un futur braquage. Faïd refait surface, des objets intriguent les enquêteurs Pour les enquêteurs, une certitude : le fugitif n'a pas quitté le territoire national. La suite de l'enquête cet été leur donne raison : le 24 juillet dans l'après-midi, Redoine Faïd échappe de peu aux forces de l'ordre dans le Val-d'Oise. Une course-poursuite avec des gendarmes se termine dans le parking d'un centre commercial de Sarcelles, où le braqueur et un complice - qui sera identifié comme l'un de ses frères, Rachid - abandonnent leur voiture et réussissent à s'enfuir. Des fausses plaques d'immatriculation et des explosifs factices sont découverts dans le véhicule. « Ça s'est joué à quelques secondes », confie un policier. Faïd envisageait-il de remonter rapidement au braquage ? C'est plus que probable, estiment les enquêteurs qui spéculent sur la situation financière d'un malfaiteur confronté à une cavale de longue durée et forcément coûteuse. Un autre détail intrigue les policiers : dans le coffre du véhicule, il y a aussi des lingettes de toilette et des produits anti-moustiques. De là à imaginer que le fugitif dort parfois dans sa voiture au milieu des bois... Ces éléments renforcent l'idée selon laquelle Redoine Faïd n'a pas quitté la région parisienne. Des « failles de sécurité » Rendu public le 30 juillet, un rapport de l'Inspection générale de la justice sur l'évasion spectaculaire de Redoine Faïd met en lumière une « conjonction de failles de sécurité », selon la garde des Sceaux Nicole Belloubet. Dans la ligne de mire : l'absence de filins anti-hélicoptère dans la cour d'honneur de la prison de Réau et un « problème » sur le dispositif d'appel d'urgence des forces de l'ordre. Jugée « insuffisamment réactive », l'administration centrale pénitentiaire va être réorganisée. L'entourage du fugitif perquisitionné Le 5 septembre, à l'aube, une cinquantaine de policiers de la PJ de Versailles et de l'Office central de lutte contre le crime organisé (OCLCO) débarquent chez des proches de Redoine Faïd, dont un frère et trois sœurs, principalement dans l'Oise, mais aussi à Paris. Six lieux sont perquisitionnés. Plus de deux mois après l'évasion de l'homme le plus recherché de France, la police est à la recherche de nouveaux indices. Elle interroge les faussaires, les garagistes, les tenanciers d'hôtel de la région. Persuadée que Faïd n'a pas quitté sa zone de prédilection, qu'il connaît par cœur, et où il a gardé des contacts, des appuis, des planques. L'arrestation Vers 3 h du matin, ce mercredi 3 octobre, le braqueur est arrêté avec quatre autres personnes, dont son frère Rachid, deux de ses neveux et la « logeuse », dans un appartement du quartier du Moulin à Creil. « J'ai entendu du boucan », raconte Alliou Diallo, un habitant du rez-de-chaussée. « J'ai vu une centaine de policiers cagoulés. J'ai compris que c'était Redoine qu'ils cherchaient. Ils sont restés jusqu'à 6 h 30. Le quartier a toujours été très calme. J'ai jamais pensé qu'il pouvait être là ». L'assaut a été donné par les policiers de brigade de recherche et d'intervention (BRI). Des armes ont été retrouvées et deux autres complices ont été interpellés en région parisienne. Dans la matinée, depuis le seuil de l'appartement visé, et dont la porte était ouverte, on pouvait voir des gants de la police scientifique et des meubles et vêtements éparpillés sur le sol. La traque était terminée.
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