Pourquoi il est bon d'en finir avec la castration des cochons
par l'Opinion
J'avoue... Ce n'est pas le sujet le plus sexy du siècle. Mais j'ai un défi. Vous prouver qu'un sujet aussi rebutant que la castration des porcs peut avoir un intérêt... Et peut-être même qu'il peut vous donner l'occasion de briller en société - si vous arrivez à l'amener habilement dans la conversation. Plus sérieusement, et vous allez le voir, cette histoire de fin de la castration des porcs a des conséquences surprenantes et bénéfiques pour l'environnement. C'est une des quinze annonces faites par le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume le 28 janvier dernier pour améliorer le bien-être animal dans les élevages. Il sera interdit, au 1er janvier 2021, de castrer les porcelets à vif. On ne peut qu'applaudir à cette décision. Et sur le fond, tout le monde, éleveurs compris, est assez d'accord. Cela n'empêche pas de se pencher sur la pratique, sur les raisons pour lesquelles elle s'est installée et sur les alternatives. Les porcelets mâles sont castrés en France avant leur 7e jour, le plus souvent à vif. Pour quelle raison ? Parce que lorsqu'ils grandissent, certains porcs produisent des hormones qui donnent à la viande, surtout aux parties grasses, comme les lardons, une odeur forte et désagréable qui se dégage à la cuisson. On parle de 2 à 3% des animaux. La viande est tout à fait consommable en termes sanitaires, mais elle rebute les consommateurs français. Enfin... pas tous ! Certains d'entre nous (une personne sur deux) sont incapables de percevoir cette odeur ! Et si elle est considérée comme dégoûtante dans certains pays, elle ne l'est pas dans d'autres... En Grèce, par exemple, on s'en fiche. C'est une affaire de goût, une affaire culturelle. Mais pour éviter que cette viande qui en est issue se retrouve sur le marché français, on a fait le choix de castrer tous les animaux mâles. Depuis le début des années 2000, on a commencé à s'interroger sur la pratique, sous l'influence des associations «welfaristes» qui veulent améliorer le sort des animaux. Certains pays ne castrent pas les porcs. On ne le fait pas ou plus en Grande Bretagne ou en Espagne, par exemple, mais c'est parce que les animaux sont abattus plus jeunes, avant que les hormones s'expriment et risquent de donner à la viande l'odeur désagréable. En Belgique, on utilise des immunocastrations à base d'hormones. Un peu partout, on travaille aussi sur la sélection génétique, car certaines espèces de porcs produisent moins d'individus «odorants»... C'est comme cela qu'on les appelle ! En Allemagne et aux Pays-Bas, on procède autrement. On a formé des nez, des professionnels de l'odeur, comme en parfumerie. Ils officient dans les abattoirs et détectent l'odeur sur les carcasses. Celles-ci sont isolées des autres. On utilise la viande maigre qui ne sent rien, mais la viande grasse est destinée aux marchés où l'odeur n'est pas considérée comme gênante. Eviter la castration des porcs cause donc un surcoût pour les abattoirs, qui doivent recruter un personnel qualifié. Mais cela a des bénéfices surprenants pour les éleveurs et pour l'environnement. D'abord, on utilise moins d'antibiotiques : la castration est une blessure, en l'évitant, on évite des infections. On limite l'utilisation de ressources. Comme un chat castré, un porc castré mange plus ! En évitant la castration, on réduit les portions de nourriture et le besoin de surfaces cultivées. Et par conséquent, on limite aussi les effluents, les lisiers, de façon significative. Le changement est possible, même s'il nécessite d'être accompagné pour être efficace. Il faut par exemple envisager une évolution du label rouge qui impose la castration. La castration est aussi souvent plus nécessaire à l'élevage bio, qui élève les porcs plus lentement et plus longtemps, ce qui multiplie les risques d'avoir une viande «odorante». La castration n'est pas le seul chantier des éleveurs de porcs. Ils travaillent déjà sur un autre sujet : la caudectomie. C'est-à-dire le fait de couper les queues en tire-bouchon dans les élevages. Encore une blessure inutile... On le fait parce que les animaux stressés mangent la queue de leurs congénères. Pour y remédier, on fait appel à des éthologues, des spécialistes du comportement animal. Ils étudient les facteurs de stress des animaux, de façon à les réduire. Et de cette façon, on pourra, dans quelques années, éviter d'infliger aux animaux une souffrance dont on peut se passer. Voilà, mission accomplie - un tour d'horizon complet sur la castration des porcs. Ne me remerciez pas, je suis heureuse d'avoir contribué à enrichir la discussion de votre prochain déjeuner familial.
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