Le grand angle diplo : quand les Africains votent et que les autocrates s’accrochent
par lejdd
Sur les 16 élections présidentielles qui se dérouleront cette année en Afrique subsaharienne, plus d’un tiers d’entre elles ont été programmées pour maintenir des autocrates au pouvoir. L’élection présidentielle du 18 février en Ouganda pourrait, par exemple, reconduire l’actuel chef de l’état Yuweri Museweni, pour un cinquième mandat. Ce qui relance le débat sur la démocratie et la stabilité. Pour mettre le doigt là où ça fait mal, on constate que sur ces 16 scrutins contestés, deux seulement vont se dérouler en pays anglophone. En Ouganda donc mais aussi en Gambie où l’actuel président, Yayah Jammeh est en place depuis 22 ans. Pour le reste, un quart de siècle après le fameux sommet France-Afrique de La Baule sur la gouvernance démocratique, on remarque que la plupart des chefs d’Etat qui s’y trouvaient à l’époque sont encore là. C’est le cas du congolais Sassou N’guesso, qui a accumulé en deux fois près de 30 ans de mandat. Pour se représenter à la tête du Congo Brazzaville, il a fait modifier la Constitution, malgré les mises en garde de François Hollande à l’égard de régimes où les lois fondamentales sont violées pour raisons personnelles. On peut en dire autant du président Guelleh à Djibouti en place depuis 17 ans, de Joseph Kabila, au Congo Kinshassa, qui, lui aussi veut se faire réélire cette année alors qu’il est au pouvoir depuis 15 ans, du tchadien Idriss Deby au pouvoir depuis 1990, ou de l’équato-guinéen Obiang en poste depuis 37 ans. La plupart de ces présidents estiment qu’ils sont indispensables à la tête de leur pays, notamment pour en assurer la stabilité face aux menaces régionales ou intérieures. C’est là un vrai débat sur la crédibilité démocratique. Au ministère de la défense à Paris, on estime que face aux périls du terrorisme djihadiste notamment, il faut privilégier la stabilité sous prétexte qu’il n’y a pas de démocratie sans sécurité. Mais la chute de Compaoré au Burkina, ou la transition pacifique au Bénin qui votera également le 6 mars, prouvent que des passages de relais bien ordonnés peuvent se produire sans dégâts majeurs. A condition que les autocrates organisent suffisamment à l’avance leur succession et laissent surtout à l’opposition des chances réelles de l’emporter en respectant les règles. Car lorsque le jeu démocratique est globalement respecté, ça marche. C’est ce qui s’est remarquablement passé au Nigéria l’an passé et c’est ce que l’on regardera avec attention au Niger où le président Issoufou se représente le 21 février. Autrement dit, la démocratie en Afrique n’est plus un sujet tabou. Mais il ne suffit pas d’organiser des élections pour qu’elle s’exprime. Encore faut-il qu’elle vive à travers le renouvellement de la classe politique et que les oppositions sachent se fédérer pour représenter des alternatives crédibles
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