L'empire du futur proche - Michel Feher (duo)
par Mediapart
Chronique Mediapart n°38 du 19.07.12 - L'EMPIRE DU FUTUR PROCHEduo avec Michel Feher - paroles et musique : la Parisienne LibéréeOn raconte qu’autrefoisAu temps du libéralismeOn ne comptait que sur soiC’était avant le cataclysmeAvant que la météoNe suspend’ au dessus de nos têtesUn nuage de capitauxAvant qu’il ne pleuve des dettesLa plus grave erreur que l’on fait à gauche, c’est de penser qu’il faut se battre contre le libéralisme. Le libéralisme est mort en 1979. […] On n’est plus dans une économie du profit, mais dans une économie du crédit.« Si les marchés financiersVenaient à nous contrôler… »J’en vois déjà qui s’inquiètentQu’ils se rassurent, c’est chose faite !Eviter de paniquer,La vertu c’est l’optimismeN’alarmons pas les croupiersDu néolibéralismeAujourd’hui et depuis trente ans, l’économie de casino ce n’est pas une menace, c’est effectivement ce qui dirige la société.« Citoyens libérons-nous !Cela ne peut plus durer »Criait un homme à genouxEn saisissant son épéeCalme-toi, dit son copainT’as raison, c’est dégeulasseMais patiente, si tu veux bienJ’suis dans mauvaise passeJ’ai placé le peu d’argentQue j’avais pu épargnerOn luttera mais pas maintenantLà, j’ai besoin des intérêtsEt puis pense à ta maisonQui n’est pas finie de rembourserFaut se révolter, t’as raison- Mais faut savoir où loger.« Allez ça va, j’ai compris »Lui répondit le héros« D’abord je paye mon créditEnsuit’ je rachète une auto… »Qu’est-ce que ça veut dire « protéger les gens des marchés financiers ? » À droite, cela veut dire : faire ce que les marchés financiers demandent. C’est le principe de la mafia. Comment on se protége de la mafia ? On se protège de la mafia en payant ce que la mafia demande, et là on est protégés : elle ne nous attaque pas. D’ailleurs la mafia, elle vient dire ça - elle dit : « je suis là pour vous protéger ». « De qui ? » « De nous, si vous n’acceptez pas de payer pour la protection. » Donc apaiser les marchés financiers c’est ça. […] Du côté des sociaux-démocrates, on ne peut pas tout à fait dire ça. Donc on dit : « certes il faut apaiser les marchés financiers, mais de façon juste, c’est-à-dire en répartissant l’effort pour tout le monde… »Comme il y a moins de services publicsLes citoyens sont fâchésEt les hommes politiquesSe trouvent bien embarrassés« Les gens veulent qu’on les protège,C’est peut-être pas une bonne idéeMais voyons ce que les stratègesOnt à proposer « De quoi est-ce qu’on pourrait bien les protéger ? On pourrait les protéger d’une invasion étrangère, de millions et de millions d’Africains qui envahiraient l’Europe ? Ouais. Alors évidemment ce n’est pas vrai, mais on n’a rien d’autre en magasin alors qu’est-ce qu’on va dire ? Et puis c’est crédible, de temps en temps y’a quelques barques » […] Nicolas Sarkozy avait fait un grand truc là dessus, un grand discours sur l’étroitesse du détroit de Gibraltar... « Il est tout petit le détroit de Gibraltar. Il y a plein plein plein plein d’Africains de l’autre côté. La plupart des Africains sont de l’autre côté, hein, il faut savoir ça. »Il y a comme une fidélitéUne sorte d’accoutumanceQui pourrait presque s’appeler« Néolibéralodépendance »Chacun a besoin de sa doseBeaucoup rêvent de décrocherMais l’avenir n’est pas roseEt peine à rougeoyerLa grande force du néolibéralisme c’est de pouvoir répondre quand on lui dit « Ca ne va pas tenir longtemps votre système, ça va mener à la catastrophe. Dans un petit temps, ça sera fini » - « Sans doute mais ça c’est dans le futur plutôt éloigné. Et le grand avantage du futur proche sur le futur éloigné, c’est qu’il vient avant ! Donc peut-être qu’après-demain ce sera le désastre, mais demain il y a quand même un maximum de retours sur investissements à retirer… » […] Le néolibéralisme, c’est l’empire du futur proche.L’avenir est compromisLe présent saccagéMais jamais jusqu’iciLe temps ne s’est arrêtéSurprenons les marchésEn estimant le mondeA nous de spéculerToutes les nanosecondes !L’enjeu ce n’est pas de revenir en arrière au bon vieux temps du libéralisme. L’enjeu c’est, à mon avis, de changer les conditions d’accréditation. C’est-à-dire accepter qu’on vit dans un monde du crédit. Le véritable enjeu c’est : « qu’est-ce qui donne du crédit ? Qu’est-ce qui donne de la valeur ? »Paroles et Documents : http://www.mediapart.fr/journal/france/190712/la-parisienne-liberee-lempire-du-futur-proche-duo-avec-michel-feher [accès abonnés] / http://www.laparisienneliberee/l-empire-du-futur-proche/
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