Janet Yellen. Quand la patronne de la puissante Fed cherche à rassurer... et rate son coup
par Ça Zap - Zapping TV
Janet Yellen. Quand la patronne de la puissante Fed cherche à rassurer... et rate son coup. Janet Yellen, patronne de la Réserve fédérale américaine, et à ce titre une des femmes les plus puissantes de la finance mondiale, va bientôt quitter son poste. Lors de sa dernière conférence, elle a voulu rassurer les marchés. Elle n'a fait que les inquiéter franchement. Explications. Quand Janet Yellen, la toute-puissante patronne de la Réserve fédérale américaine (Fed), tient son ultime conférence avant de quitter son poste (elle sera remplacée par Jerome Powell), on l'écoute. Mais quand elle déclare que l'aplatissement de la courbe des taux ne doit pas être interprété comme le signal d'un ralentissement de l'économie, la plupart des spécialistes de la finance éprouvent comme un sentiment de déjà-vu. Et commencent à s'inquiéter pour de bon. Car les prédécesseurs de Yellen, Alan Greenspan et Ben Bernanke, ont en leur temps employé exactement la même formule... avant que ne commence la dernière récession économique en date aux États-Unis. Alan Greenspan en 2005 En juillet 2005, Alan Greenspan, alors président de la Fed, avait déploré une « idée fausse » concernant l'importance de la courbe des taux. « L'efficacité de la courbe comme outil de prévision a diminué de manière très significative », avait-il dit. Le comportement supposé inhabituel des taux longs, qui se sont mis à chuter en 2004 alors que les taux d'intérêt remontaient, avait été qualifié d'« énigme » par Alan Greenspan. La Fed avait entamé en mai de cette année-là un cycle de resserrement monétaire qui allait porter les « Fed funds » d'un creux d'un demi-siècle à 1 % à 5,25 % deux ans plus tard. Ben Bernanke en 2006 En mars 2006, à peine un mois après avoir succédé au « Maestro » à la tête de la Fed, Ben Bernanke avait fait écho aux propos d'Alan Greenspan en invitant lui aussi à dédramatiser les augures de la courbe des taux. « Je n'interpréterais pas le fait que la courbe des taux soit actuellement très plate comme l'indication d'un ralentissement économique significatif à venir », avait dit le 20 mars devant l'Economic Club de New York. Ben Bernanke était aux commandes pour la dernière période d'un cycle de resserrement étalé sur deux ans qui a vu les taux d'intérêt de la Fed prendre 425 points de base contre 40 seulement pour le rendement des Treasuries à 10 ans. La courbe s'inverse L'écart de rendement (« spread ») entre les Treasuries à 2 et 10 ans s'est resserré à zéro fin 2005, contre 225 points de base au début du cycle, avant que la courbe des taux ne s'inverse, début 2006. Cette inversion allait se prolonger jusque tard dans l'année 2007, juste avant que ne s'amorce la récession, en décembre de cette année-là. Pour résumer, deux présidents de la Fed avaient, en l'espace de huit mois, minimisé l'importance de la fébrilité des taux longs en argumentant que l'économie sous-jacente était bien plus robuste que ne le suggérait l'aplatissement de la courbe des taux. La courbe des taux annonce-t-elle les récessions ? Pour rendre justice à Alan Greenspan et Ben Bernanke, il faut reconnaître que la récession n'a frappé que bien après qu'ils aient mis en doute la nature prédictive de la courbe des taux. Cela s'explique en partie par la nature lente, progressive et bien balisée du cycle de resserrement piloté par la Fed de 2004 à 2006. Avec une inflation qui tarde à se réveiller, l'actuel cycle de resserrement conduit par la banque centrale américaine est encore plus mesuré. Le premier relèvement est intervenu il y a deux ans, et le dernier laissera très certainement les taux à un niveau bien inférieur à celui d'avant la crise. Si la récession met autant de temps à se manifester après les propos de Janet Yellen qu'après ceux de ses prédécesseurs, les investisseurs pourraient encore prendre du bon temps pour une paire d'années. En réponse à la dernière question lors de la conférence de presse de la semaine dernière, Janet Yellen, qui dirige la Fed depuis près de quatre ans et s'apprête à tirer sa révérence, a qualifié l'aplatissement actuel de la courbe des taux d'anomalie purement technique. Les récessions ne préviennent pas « Je crois qu'il y a de bonnes raisons de penser que la relation entre la pente de la courbe des taux et le cycle économique pourrait avoir changé », a-t-elle dit. L'économie américaine paraît en effet en bonne santé, avec une croissance supérieure à 3 % en rythme annualisé, un taux de chômage au plus bas depuis 17 ans et des marchés d'actions qui battent des records pratiquement tous les jours. Peut-être l'aplatissement de la courbe des taux a-t-il en effet perdu sa signification. Ou peut-être pas. Le cycle économique en cours est l'un des plus longs jamais observés et l'on sait que les récessions et les ralentissements ne préviennent pas et surviennent généralement quand tous les voyants extérieurs sont au vert. Si la Fed relève ses taux l'an prochain autant qu'elle a l'intention de le faire, la courbe des taux va probablement s'inverser, ce qui voudra dire que les banques n'auront plus d'intérêt à prêter de l'argent. Le resserrement du crédit devrait alors ralentir l'économie et la récession pourrait s'afficher à l'horizon. Certains des décideurs de la Fed en sont conscients, comme le président de l'antenne de Sain-tLouis, James Bullard, qui a déclaré ce mois-ci qu'une inversion de la courbe des taux était « un signal naturellement baissier réclamant l'attention des marchés et des décideurs monétaires. » Quel niveau d'attention ? On le saura dans les semaines ou les mois à venir.
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