Betteraves: un désastre économique autant qu'écologique
par Lopinionfr
Une invasion de pucerons hors norme dans des champs qui ne sont plus protégés par les enrobages de semences aux néonicotinoïdes a provoqué une chute de 30% de la récolte par rapport à la moyenne des cinq années précédentes. Il faut remonter à plus de 20 ans pour trouver trace d’une production aussi basse. Dans certaines régions, plus de 50% des récoltes ont été détruites. Et contrairement à ce que l’on a pu lire et entendre, les betteraves bio n’ont pas été épargnées. Dans les zones où les cultures ont été touchées, elles l’ont été, exactement comme les autres. Il n’y a aucun miracle. Economiquement, le bilan est désastreux. Le manque à gagner pour les planteurs de betteraves est estimé à 280 millions d’euros et entre 600 et 700 millions d’euros pour la filière sucrière – cela, c’est le chiffrage de la réduction de la production de sucre de 6 millions de tonnes d’ordinaire à 3,5 à 4 millions de tonnes cette année. Sans compter que les usines vont devoir tourner en sous-régime, ce qui plombe les comptes : 4 sucreries ont déjà fermé en 2019, les autres ont du mal à joindre les deux bouts. Ce sont les contribuables français qui vont donc devoir payer pour indemniser les conséquences de la décision politique hâtive de supprimer un traitement sans alternative. Il va maintenant falloir mettre les deux années à venir à profit pour tenter de trouver des alternatives aux néonicotinoïdes en enrobage de semences. Un travail lent, compliqué, il y a quatre maladies différentes à traiter. Et pour l’heure, aucune solution technique probante. Les opposants aux néonicotinoïdes expliquent que ce n’est pas très grave, qu’on se passera du sucre français, qu’on en produit ailleurs, en Pologne par exemple, comme le rappelait l’ancienne secrétaire d’Etat Brune Poirson il y a quelques jours. Et tant pis pour le gel hydroalcoolique, qui repose aussi sur la production de betterave. Ca n’est pas très responsable. La France, premier producteur européen, fournit à elle seule 30% du sucre européen. Elle en exporte 2,5 millions de tonnes, dont 1,8 millions de tonnes vers ses voisins. L’Allemagne et la Pologne sont très loin de pouvoir répondre aux besoins du continent. Si on devait ne plus faire de sucre en France… L’Europe l’importerait du Brésil. Résumons : sacrifice de la filière, des emplois, de l’outil industriel, de la souveraineté alimentaire pour finalement faire traverser l’océan à des vraquiers plein de sucre produit dans des conditions bien pires que ce qui se pratique ici. Chacun est libre de juger de la pertinence écologique de ce saccage économique.
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